Les peintres impressionnistes utilisent largement l’association entre le bleu et le jaune. Il suffit de feuilleter un catalogue de peinture impressionniste pour voir ces deux couleurs dominer, se mélanger, se superposer en taches de lumière qui dialoguent avec l’eau. Jouant à l’infini avec les impressions fugitives, la mobilité des phénomènes climatiques, l’ombre et le reflet, l’association de ces deux couleurs est idéale. On pourrait consacrer une émission par peintre, peut-être même une émission par tableau ! Je vais me contenter d’une évocation, comme l’avant-goût d’un long voyage.
« Un matin, l’un de nous manquant de noir, se servit de bleu : l’impressionnisme était né » écrit Pierre-Auguste Renoir. De l’artiste, on peut citer La Femme en bleu, tableau de 1874. La jeune femme est tout de bleu vêtue ; seuls le bas des manches et le haut du col apparaissent en blanc. Les transparences de bleu dilué sont réalisées à partir de bleu de cobalt, bien que Renoir affectionne tout particulièrement le bleu outremer (on peut se référer à l’article Le bleu outremer et les peintres et à toute la série sur le bleu outremer : liens à la rubrique la couleur bleue). Je pense aussi au Bal du moulin de la Galette de 1876 : la scène baigne dans une ambiance bleutée parsemée de taches de lumière qui traversent le feuillage des arbres avant d’atteindre la foule.
Claude Monet, dans sa toile Lavacourt sous la neige, utilise un bleu outremer verni avec de la laque rouge pour obtenir le violet que l’on retrouve sur le sol et dans le ciel. En revanche, il emploie du bleu de cobalt pour colorer les chaumières. Sa série sur les nymphéas est plus tardive.
Monet cultive les nymphéas, nom savant des nénuphars blancs, dans le jardin d’eau qu’il fait aménager en 1893 dans sa propriété de Giverny. À partir des années 1910 et jusqu’à la mort du peintre en 1926, le jardin et son bassin deviennent son unique source d’inspiration. Il dit : « J’ai repris encore des choses impossibles à faire : de l’eau avec des herbes qui ondulent dans le fond. En dehors de la peinture et du jardinage, je ne suis bon à rien. Mon plus beau chef-d’œuvre, c’est mon jardin. » Monet concentre le point de vue sur une petite zone de l’étang, un morceau de nature, un gros plan sur lequel jouent les reflets du ciel et les transparences. La déclinaison des bleus y est une des plus larges que je connaisse !
Cet article est tiré d’une émission diffusée le 29 avril 2013 sur RCF Isère dans le cadre de la série « Tout en nuances » qui a duré pendant six années. Elle est présentée ici. L’article a été mis à jour le 19. avril 2022 et figure dans le livre Bleu, intensément, chapitre 73.
Article du 29 avril 2013 mis à jour le 19 avril 2022