L’original de la Croix de San Damiano se trouve à Assise. La tradition dit que, vers 1205, alors que François priait devant l’icône, il entendit une voix venant du crucifix. Voilà comment nous le raconte La Légende dorée p. 561 et 562 (voir article ici) :
« Un jour qu’il était entré, pour prier, dans l’église de Saint-Damien, l’image du Christ lui parla miraculeusement et lui dit : « François, va réparer ma maison, car, comme tu le vois, elle tombe en ruine ! » et, dès ce moment, son âme se fondit de tendresse, et la compagnie du Christ se grava dans son cœur. »

L’icône date de la fin du XIIe siècle, ce qui est très intéressant pour les iconographes, car à cette période, l’art occidental et l’art byzantin répondent encore à peu près aux mêmes critères. Il est fort possible d’ailleurs que la réalisation ait été influencée par la présence de moines syriens présents à l’époque dans la région, ou même que l’artiste ait été l’un d’entre eux. Aux siècles suivants, les représentations vont évoluer (voir l’évolution de l’œuvre de Cimabue : ceux qui me connaissent savent que c’est un de mes sujets favoris). Au fil du temps, de l’évolution de la sensibilité artistique et théologique, le Christ en croix occidental va devenir un défunt et fermer les yeux, son corps deviendra celui d’un supplicié, la couronne d’épines et le sang apparaîtront ; la tonalité verdâtre, évoquant un corps sans vie, se renforcera. Bref, l’accent sera mis sur la souffrance que le Christ partage avec l’humanité. Au contraire, dans l’art médiéval occidental, tout comme dans l’art byzantin et l’iconographie, le Christ est représenté glorieux, transfiguré, exagérément grand par rapport aux autres personnages, les yeux grand ouverts tournés vers nous. Tout au plus, on devine de discrets stigmates. L’accent est mis délibérément sur la Résurrection. C’est une différence fondamentale dont témoigne parfaitement ce « Christ de San Damiano ».
L’œuvre, spécialement vénérée par les sœurs clarisses, qui, depuis 1257, ont veillé sur elle, se trouve aujourd’hui dans la basilique Sainte-Claire d’Assise.
L’icône est peinte sur un panneau de bois de noyer entoilé d’une épaisseur de 12 cm. Il est probable qu’il ait été destiné à être accroché au-dessus de l’autel de la chapelle Saint-Damien. Des scènes figurent autour du Christ ; on y voit aussi des anges, et dans une sorte de mandorle, la main du Père esquissant un geste de bénédiction. Sur les côtés, on trouve Marie et saint Jean à gauche ; Marie-Madeleine, Marie mère de Jacques et le centurion à droite. Des personnages plus petits figurent plus bas : les soldats témoins de la crucifixion et, au pied de la croix, en très petit format, divers saint patrons de l’Ombrie.
Bien sûr, pour réaliser cette petite icône d’à peine 25 cm (l’original fait 190 cm) j’ai dû beaucoup simplifier. Elle s’inspire seulement de l’original, le Christ de San Damiano, s’appuie sur le modèle, comme c’est souvent le cas pour l’icône, tout en « volant de ses propres ailes » !
